[RP] Sur les routes des terres acides

Slyph s'était senti rassuré par l'assurance du paladin. Hélas, l'ombre noire de l'oiseau continuait à planer au dessus de lui. Lorsque le soir vint enfin, il fut heureux de voir Turielo s'arrêter. Une pose, voilà qui me manquait. Mais ce n'est pas fini, encore faut-il installer le camp.

A peine arrivés, il vit la dernière venue, Nymia je crois, dételer ses chevaux puis les laisser se coucher. Comment ! Je n'avais jamais vu des chevaux se coucher pour dormir ! On m'avait raconté qu'ils dormaient debout. Comme ils doivent être fatigués,... Elle se couche ensuite à son tour auprès d'eux. Elle me semble épuisée,... Et elle ne s'est même pas occupée de sa carriole. Si je me rendais utile ? Slyph se rendit donc auprès du véhicule et commença à en inspecter l'extérieur. Il remarqua qu'une des roues était à la limite de se briser. Il incanta donc rapidement un petit sort permettant de raccorder les fibres de bois telles qu'elles l'étaient avant. Il vit avec joie les différents morceaux de bois se rapprocher et se raffermir. Quant aux cerclages de fer, ils s'adaptèrent à la roue comme si de rien était.La roue était comme neuve. Mais quelle saleté ! Cette roulotte a fait bien trop de chemin ! Il faut récurer les roues.

Le semi-Ange se mit à la tâche, mais sans magie ce coup-ci. Il utilisait une petite dague pour enlever les tas de boue qui s'étaient amoncelés sur les roues. Ayant aidé un forgeron dans son enfance, s'occuper des roues était peu difficile pour lui. Mais cela lui rappelait son village natal, sa mère, le forgeron. Cet homme si bon qui lui avait sauvé la vie. Qu'a-t-il bien pu devenir ? Mort sans doute, depuis le temps. C'était un brave homme, j'espère qu'il a vécu vieux. Lorsqu'enfin il eut fini de s'occuper des roues, il hésita puis osa ouvrir la porte de la carriole. [Hrp]Je laisse le soin à Eraneir de décrire cet intérieur que je ne connais pas.[/Hrp] A peine eut il jeté un coup d'oeil et vu que rien ne s'était renversé, il ressortit, honteux : il venait de violer l'intimité de quelqu'un. Il sortit donc et se tourna vers le reste du groupe.

Il s'approcha de l'elfe noir qui ramassait du bois.

Excusez-moi, je suis capable de soigner le blessures, en tant qu'Ange vous savez, et je vous ai entendu claudiquer toute la journée. Voulez vous que je m'occupe de vos blessures ? Il me reste encore un peu d'énergie et, si vous le voulez, je peux toujours la dépenser pour vous. De toute façon, tant que cet oiseau sera là, je ne pourrais rien faire d'autre

Trop fatigué et affaibli pour chercher une quelconque réplique cinglante à l'intention de l'ange, Shiroï se contenta d'un simple et faible "Allez-y...". Au point où il en était, n'importe quoi plutôt que de rester à moitié infirme pendant encore une journée.
Défaisant ses bandages, il révéla à l'ange ses côtes et sa peau talée.

De son côté, Dhyna cherchait dans les rares buissons tout ce qui pouvait faire montre d'un passage d'animal. Avec un peu de chance, un lièvre croiserait sa route. Mais pour le moment ça ne se révélait pas probant. Mieux valait chercher un point d'eau, elle aurait plus de chance de trouver quelque-chose là bas.

Pfiou ! souffla le semi-Ange lorsqu'il découvrit la blessure de l'elfe. Voilà quelque chose qui sera bien difficile à soigner,... ajouta-t-il mentalement.

Messire Shiroï, je crains qu'il ne faille être patient, il me faudra une vingtaine de minutes pour faire agir ma magie. un peu moins si tout se passe bien. Adossez vous contre cet arbre et laissez vous faire. Slyph laissa le temps de s'installer au dumner puis s'agenouilla à ses côtés.

Il posa alors délicatement ses mains sur la plaie et commença à incanter. Il répétait sans cesse les mêmes mots incompréhensibles "Agèj fébinol". Il avait appris ces quelques mots de son maître. Il s'agissait d'une phrase simple : Que la plaie soit guérie. Mais cette phrase prononcée dans un ancien langage avait assez de puissance pour effectivement guérir les plaies. À condition de savoir ce que l'on disait et de graver les glyphes significatifs dans son esprit. Hélas la simplicité de la phrase était aussi son problème : moins la phrase était précise moins elle agissait aisément. Pour lancer une boule de feu, il faut connaître les "mots" lancer, boule et feu ainsi que leurs écritures en ancien langage, du moins dans ce type de magie. Et encore, il faut alors les prononcer correctement pour ne pas se retrouver simplement avec une flammèche. Cette magie ancienne possède une branche curative et c'était celle là que Slyph utilisait, en tâtonnant certes, mais il savait garder un semblant d'assurance pour faire croire à son entourage qu'il savait toujours ce qu'il faisait.

Et peu à peu, la blessure de l'elfe noir se résorba (et d'autres menues blessures alentour). Une vingtaine de minutes plus tard, le soin fut bel et bien fini. Slyph sourit.

Vous voyez, vous pouvez maintenant gambader comme avant ! Plus besoin de ces bandages. Reposez vous à présent, le temps que votre corps reprenne ses repères. Il faut qu'il s'habitue à ne plus avoir mal. D'ici une heure vous serez en parfaite santé.

Quant à moi, il va me falloir me reposer,... La magie ça use...

Le demi-ange chercha un arbre à l'aspect confortable, retira son manteau et sa chemise, les roula en boule et s'allongea à même le sol sur le côté en veillant à ne pas froisser ses ailes. Puis il ferma les yeux et s'endormit comme une souche.

Emportée par l'élan d'Eraneir, Leïla avait suivi l'elfe sur le sol. Elle était à présent elle aussi à genoux, regardant son compagnon sans comprendre. Il lui avait raconté tellement de choses... Elle avait l'impression de tout connaître de lui, de sa vie... elle n'arrivait pourtant pas à saisir sa réaction inattendue. Il savait où Drag'z se rendait, et agissait comme si son destin était tout tracé... mais elle ne le devinait pas.
L'elfine était prise au dépourvu, complètement. Mais elle savait une chose : son ami était en peine, et si elle était avec lui à ce moment, ce n'était pas pour le laisser se noyer... Alors elle passa ses bras sous ceux d'Eraneir, et laissa aller sa tête sur son épaule. Ce n'était pas grand chose... rien du tout, peut-être... mais il saurait qu'il avait été écouté...

- Tu n'es pas seul...

La peur de ne plus revoir un ami, elle qui avait longtemps vécu seule, trop longtemps... elle la connaissait à présent. Rien ne pouvait retenir Eraneir s'il décidait de rejoindre le nain, rien ne l'empêcherait de s'abîmer dans la tristesse... sauf peut-être un peu d'affection... Cette gitane qu'il avait fréquentée de lui en donnerait plus. Le nain, presque un frère en débordait... mais il était loin. Leïla ne pouvait s'empêcher de penser que, quelque part, il n'y avait qu'elle pour l'empêcher de sombrer... Quelques larmes coulèrent en écho au chagrin de l'elfe sur ses joues, retombant en pétales argentés sur l'herbe.

- Je suis là...

-Merci... Merci.
Chuchotés, presque exhalés, ces deux mots raffermirent pourtant son ton. Ses tremblements s'arrêtèrent et, après une dernière embrassade, il se redressa, relevant Leïla en même temps. Il n'y avait plus traces de détresse dans ses yeux, rapidement remplacé par une légère gêne s'y installa, qu'il cacha avec un peu de retard dans une ultime accolade, puis en se remettant en marche. Sans lâcher l'épaule de Leïla.
-Je suis désolé, tu sais. Tu n'as vraiment pas besoin que je t'embête avec tout ça... On a tant de choses à s'occuper avec ses propres problèmes... Dis-moi comment avance tes retrouvailles avec ton ami amnésique, le temps qu'on retrouve les autres.
Dans le ton d'Eraneir, "ami" n'avait pas la valeur de "vieille connaissance".

[A l'intérieur de la roulotte de Nymia, il y a tout un bric à brac insolite et incroyable. C'est un foutoir complet. La déco en elle-même, faites de riches drapés de couleur chaude et oppressante, est extrêmement intimiste...
Quel fouineur, ce Slyph. Il a pas honte? ]

Le discret remerciement toucha le cœur de l'elfette dans son secret. Elle ne pensait pas le mériter, pourtant... Comme le soleil après la pluie, un sourire effaça la tristesse, laissant le visage de Leïla d'autant plus rayonnant. Eraneir avait lui aussi abandonné ses larmes, oublieux des sombres pensées qui se cachaient en lui. Un mot, répété, avait fendu les yeux de la jeune guerrière, heureuse simplement de voir son ami aller mieux. La jeune fille ne savait réellement si elle était la cause de ce retournement, mais le pensait, au moins en partie... Le message était passé, l'elfe savait ce qu'elle avait à offrir...
Son compagnon tourmenté l'étreignit encore, pour la relever cette fois, en même temps que lui. Leïla eut la courte impression que ses jambes ne la portaient pas, avant de toucher à nouveau le sol. Il la regardait toujours, de cet air que Leïla n'arrivait pas à comprendre, mais si elle lu de la gêne, elle ne le montra pas. Elle se contentait de sourire, joyeuse, et sans doute un peu naïve, de la bonne humeur retrouvée.

Après un dernier échange, les complices poursuivirent leur cheminement. L'elfine laissait ses pensées suivre seules leur cours, notant au passage qu'Eraneir avait gardé un contact avec elle... Cela ne lui déplaisait pas vraiment, mais Leïla en vont tout naturellement à s'en demander la raison... Peut-être juste parce qu'ainsi il la sentait plus proche, le départ de Dragz comme un traumatisme qu'il ne voulait pas voir renouvelé... Peut-être pour mieux cerner sa promesse... Peut-être... pour rien... Son compagnon brisa assez vite le silence, rompant en même temps le fil que suivait Leïla, mais elle n'était pas là pour s'en offenser.

- Je suis désolé, tu sais. Tu n'as vraiment pas besoin que je t'embête avec tout ça... On a tant de choses à s'occuper avec ses propres problèmes... Dis-moi comment avance tes retrouvailles avec ton ami amnésique, le temps qu'on retrouve les autres.

L'elfe resta un instant interloquée, avant de se décider à répondre clairement.

- Il ne se souvient toujours pas de moi... mais je crois qu'il m'aime bien...

Même si ce simple fait était en soi déjà une victoire pour elle, elle ne put empêcher une certaine déception percer au travers de sa voix légèrement tremblante. Le regard fuyant pour prononcer ses mots vint se planter franchement dans les yeux d'Eraneir, pour affirmer ses sentiments.

- Mais tu sais... tu ne m'embêtes pas. Mes problèmes sont bien insignifiants, et si j'ai la moindre chance de t'aider...

Leïla signifiait par là le réconfort qu'elle pourrait apporter, un soutien moral, si ce n'était physique (elle avait en tête en particulier la main innocemment posée sur son épaule), la moindre parole qui remonterait le moral de son ami... Elle esquissa un léger sourire, moqueur envers sa propre naïveté, puis détourna les yeux. Ce n'était pas à elle de décider de ça...

Une femme qui tire au fusil dans un monde étrange... D'immenses bâtiments de métal... Une mer infinie... Du noir... Tout autour de lui des planètes, des étoiles... Shanaya virevoltant au milieu de tirs la visant... Un homme tout de noir vêtu fumant un étrange tabac noir et portant deux lames dans le dos... Un corbeau noir planant au dessus de lui alors que la bataille fait rage... Slyph se réveille en sursaut. Encore un de ces stupides rêves... D'où puis-je sortir tout ça ? En tout cas, c'est sûr que je ne me suis pas réveillé à cause de cela,... Le semi-ange huma l'air à la façon d'un animal sauvage. Pas d'odeur précise... Slyph remit sa chemise, se releva discrètement et se faufila dans la forêt. Tiens,... L'ami corbeau est toujours là... Rapidement, il fit le tour du camp et ne remarqua personne d'autre que les membres de l'équipée.

Mettons cela sur le compte de la perte d'habitude de la vie en société. De toute façon, après cela, je ne pourrais me rendormir. Allons près du feu. Le demi-ange s'approcha donc du feu et s'installa le plus confortablement possible, perdant son regard dans les flammes. Des images lui revinrent à l'esprit, le feu accueillant d'une petite maison de campagne, le feu bien mérité après une chasse dans un château bien loin d'ici tant dans le temps que dans l'espace, le feu brûlant chaque nuit dans le feuillage des arbres de lumière,... Mais d'autres images revinrent par la même : le feu ravageant un petit village, des gerbes de feu s'écrasant sur une armée, brûlant les soldats sur leur passage, le feu d'un bûcher emportant à jamais les derniers êtres qu'il avait aimés,... Des larmes virent aux yeux du semi-ange et une voix revenue du passé résonna dans sa tête, cette petite voix si douce, voix d'une jeune enfant elfique qu'il avait sauvée :

Dis-moi Slyph, pour quoi t'es pas marié ?
Parce-que je ne suis pas fait pour la paix qu'amène l'amour...
Mais moi, tu m'aime, dis ?
Bien sûr mon p'tit bout d'chou.
Et où est ma maman, pourquoi j'ai pas de parents comme les autres ?
Je t'ai déjà dit ma petite que quelque chose de terrible les avait séparés de toi à jamais. Un jour je te raconterai ce qui s'est passé...
Oh ! Slyph, je viens de me rappeler que Sofia voulait qu'on se retrouve ce soir, il y a un barde qui vient d'arriver et il raconte des histoires merveilleuses.
Vas-y Cla,... vas-y...

Se remémorant les années passées auprès de la jeune elfe, le semi-ange ressenti une vague de désespoir le submerger. Puis il leva la tête et vit Leïla et Eraneir en pleine discussion, la roulotte juste arrivée, le paladin de glace, les deux elfes noirs,... Tout n'est pas complètement pourri en ce monde. Il reste encore un peu d'espoir. Et un sourire naquit au milieu de ses larmes.

Après avoir « chassé » et fait cuire de quoi se sustenter, pendant que son compagnon jouait non loin de là. Il avait vu l'ange s'endormir après la magie pratiquée, le « prêtre » (il en avait la bure), l'avait observé mais ne voulant troubler son sommeil il n'osa le réveiller. Quand celui-ci se réveilla, il resta dans l'ombre pour l'observer quelque peu. Il ne le voyait malheureusement pas de l'autre coté du feu, alors il se décala afin de le voir, tout en évitant de rentrer dans son champ de vision. Il vit avec étonnement dans le reflet couleur flamme qui apparaissait sur le visage du céleste qu'il pleurait. S'interrogeant sur la raison de cet état, il s'approcha discrètement derrière lui et lui souffla :

« Pourquoi tant de douleur ? N'y aurait-il point quelque chose que je pourrais faire pour vous en soulager ?
- Pourquoi tant de tristesse ? ... Non, juste un brin de nostalgie... Vous savez, quand on a vécu aussi longtemps que moi, nombreux sont les morts que l'on a connus et, si je ne m'abuse, nombreux sont encore ceux à venir..."

Sans vraiment prêter attention aux paroles de son compagnon il posa sa main sur son épaule, le visage toujours baissé. Ses yeux disparaissaient entièrement devant l'ombre créé par le feu. Sa main ganté de noir ne laissait apparaître d'elle que sa finesse. Le curieux personnage sortit du tas de poche que semblait être son manteau une plante, à demi-séchée.

« Tenez, vous n'avez pas l'air totalement reposé, mâchez ceci, à défaut de changer quelque chose physiquement, cela vous aidera à calmer votre esprit et à vous délasser.
- Dites, quelle est donc cette plante ?"
Il allait commencer à lui expliquer que ce n'était qu'une plante au goût sucré qui laissait un parfum délicat en bouche quand ...

Comme à son habitude, depuis son éveil à la non-vie, le Paladin restait à l'écart. Seulement, maintenant, grâce à l'action du sort permanent, ce n'était plus à cause du froid qu'il maintenait cet isolement mais car il se sentait étranger à ce débordement d'activités qu'il voyait autour de lui.

Avec tristesse, il regardait ses compagnons se préparer pour la nuit, se restaurer ou même simplement, se réchauffer auprès d'un bon feu.

Bien qu'extérieurement amoindri, le froid mortel le tenaillait toujours intérieurement. Comment pourrait-il, dans ces conditions, apprécier la chaleur d'un bon feu ? Sans penser au fait que ses sensations lui permettait de détecter la chaleur, humaine, corporel ou celle d'un quelconque ignition, mais pas de la sentir.

A bien y réfléchir, même avant sa mort, il était devenu un guerrier inhumain, moulé dans les préceptes de son culte, délaissant tous sentiments lorsqu'il quittait sa bien-aimée Virweyn. A présent, son inhumanité de jadis était visible à tous sous une toute autre forme. Était-ce donc cela sa punition véritable ? Et non de ne pas avoir récupéré l'Oeil ?

* Ô Wotan ! Ô combien serait-il cruel de ta part de jeter ainsi ton Champion dans de tels doutes ? *

Perdu dans ses pensées, son regard tombe sur la jeune elfine, cette Leïla. Comme s'il en avait encore eu un, il sentit son cœur se serrer en la voyant se confier au vaillant Eraneir. Là résidait sûrement l'espoir de ce monde... Ce n'était pas comme ces deux-là...

Un instant submergé par une très ancienne colère, il balaie le camp à la recherche des jumeaux. Serait-ce l'intervention de Wotan qui les cacha à ses yeux ? Toujours est-il qu'il ne les sentait nulle part malgré sa vision surnaturelle...

Il se rappela alors la marque qu'il avait appliqué au mâle du duo à peau sombre. Peut-être que cela suffira à endiguer la prophétie. Du moins, s'il ne s'est pas trompé dans son interprétation...

Soudain aux aguets, le Paladin a senti une variation dans son environnement. Subtile. Comme une déformation du tissu même de la réalité qui l'entourait.

Non !

Cela ne se pouvait !

Agaërnohn imposa aussitôt le calme à son esprit comme il l'avait fait tant de fois avant les batailles pour son culte et son honneur. Il sentait un flot de noirceur provenir d'un endroit situé non loin du campement.

Proche, mais il était le plus éloigné du groupe de ce point. D'un juron, il exprima sa frustration de devoir traverser le campement au pas de charge. Tant pis pour la discrétion, il devait protéger les autres !

La ou les créatures, qu'elles quelles soient étaient toujours dissimulées à ses sens par cet écran de fumée démoniaque. A n'en point douter, ceux-là n'étaient pas là pour partager un peu de soupe ou une histoire.

"Slyph ! Appela-t'il en préparant ses armes. Il n'est plus temps de se languir, des créatures de l'En-Dessous sont sur nous !"

Sans même attendre de réponse, le paladin lourdement équipé se lança dans une course surnaturelle dont il avait durement acquis la maitrise depuis son Réveil. Le bruit de ses pas martelant le sol ne pouvait passer inaperçu mais son cri de guerre déchira la nuit tel un coup de griffe sur un tissu léger. Epée au clair et écu à la main, il chargeait dans la nuit, traversant la zone définie comme étant le campement.

La roulotte ! Voyant au travers, il l'en avait presque oublié ! Incapable de s'arrêter, il donna une puissante impulsion et s'éleva dans les airs... Hurlant toujours le cri de son Ordre.

Pour ceux qui l'observaient, il sembla monter dans les airs au ralenti tant l'action elle-même était irréelle. Et pourtant, il passa au-dessus de la toile sans la toucher et se réceptionna de l'autre coté avant de repartir en courant !

Ils étaient tous proches à présent...

Slyph s'apprêtait à prendre les herbes proposées par le prêtre ? guérisseur ? ... lorsque l'appel d'Agaërnohn retentit.


Slyph ! Appela-t'il en préparant ses armes. Il n'est plus temps de se languir, des créatures de l'En-Dessous sont sur nous !

En un instant, les réflexes acquis en une longue vie rejaillirent. Slyph se leva brusquement, complètement éveillé. Comme d'habitude, il n'était soudain plus le même. Il devenait le Loup, l'homme d'action, un être de l'instant. Tout son corps vibrait d'excitation. En effet, bien que Slyph soit une personne qui hait la souffrance d'autrui, il semble être entièrement fait pour la guerre.

Tendant l'oreille, il écoute la "musique" de l'instant. Un instant d'hésitation et il reconnaît l'air : "Alter furor", une vieille chanson chantée chez des prêtres guerriers d'un lointain pays. Mais soudain une fausse note le rappelle à la dure réalité : le corbeau est toujours là. Qui plus est, il s'est envolé de sa branche au moment où le paladin s'est mis à courir. Non ! Un combat, et je ne peux rien faire ! Le demi-ange avait déjà sorti sa grande épée et regarda soudain autour de lui. Bon, protéger les plus faibles. Fanriël, Leïla, la nouvelle venue.

Il se dirigea vers la "gitane" d'un pas pressé. Criant Fanriël, Leïla, venez !, il prit la nouvelle venue par l'épaule Madame, il faut vous réveiller ! Suivez moi.

Puis il se tourna vers l'endroit où Leïla et Eraneir se parlaient un instant auparavant.

Eraneir, pouvez vous m'aider à protéger ces dames. On ne sera pas trop de deux pour cela.

Puis il se dirigea dans le sens opposé au combat. Fuir, encore et encore. Oiseau de malheur, quand me laisseras tu tranquille ?

Interrompu dans sa discussion, le personnage se renfrogna sous sa bure, même pour une bonne raison, il détestait être interrompu. Il ne savait quoi faire, mais voyant l'ange fuir, il décida de prêter main-forte au paladin car la plupart des membres du groupe n'étaient pas en état. Il avait eu raison de ne pas s'épuiser lors du dernier combat. De sa démarche étrange, mais étrangement devenue souple, il se dirigea derrière l'armure. Il sortit de son manteau (mais combien de poche avait ce manteau et quelle profondeur avaient elles ?) deux dagues argentées finement ciselées. Chacune brillait d'un éclat particulier. C'est alors qu'il aperçu la noirceur dans la nuit. Cette noirceur, ce n'était pas de l'ombre habituelle, pour qu'il y ait ombre, il faut de la lumière, non, cette noirceur là était surréaliste, d'un noir opaque, presque consistant. Il s'agissait de noir né de l'ombre, né de l'obscurité même, sans espoir de lumière un jour. Il s'arrêta un instant dans sa course.

*Non, impossible, ils ne viennent pas pour moi, ils ne m'ont pas repérés, je n'ai pas fait d'erreur, non, ils sont surement là par hasard, je peux y aller sans risquer plus que ... Les autres ?*

Il ne voulait pas penser à ce qui arriverait, un au niveau des risques qu'il prenait juste en montant au combat, et deux si ils étaient là pour lui. Le paladin avait une large avance, du fait de son temps de réaction et surtout de l'avantage qu'il avait à la course.

A peine ralenti dans sa course par le bond prodigieux et inhumain qu'il avait dû faire pour éviter in-extremis la roulotte de la vieille gitane, le Preux ne mit pas longtemps à rejoindre le groupe d'envahisseurs. Brandissant une lame aussi étincelante dans la nuit qu'une torche allumée, il se campa droit sur ses jambes face au nuage de noirceur qui se déchira lentement, révélant la demi-douzaine d'êtres qui s'y cachaient.

Indifférent à leurs formes brumeuses, Agaërnohn se place en position de combat, tentant de se remémorer ses derniers affrontements contre ces Choses. Combien de morts, combien de massacres ces créatures informes avaient-elles perpétrées de son temps, en échange d'une promesse Démoniaque d'un peu de réalité... ? A l'époque, seule une arme bénie ou Sainte, telle que la sienne permettait de les affronter presque en égal, presque...

"Je ne sais ce qu'Il vous a promis cette fois, Créatures, mais vous n'avez aucune chance d'accomplir votre mission, qu'elle quelle soit ! Approchez ! Venez affronter celui vous enverra rejoindre vos prédécesseurs !"

Dans son poing, son épée se mit à flamboyer alors que les Créatures approchaient lentement. Elles dégageaient une aura dérangeante, malsaine, comme froide et chargée de mauvaises intentions... mais envers qui ?

"Le Paladin..." siffla l'une des Choses. "Notre Maïtre saura content de nous lorsque nous lui ramènerons ta tête... Même si tu n'étais pas notre cible première, évidemment..."

Le guerrier resta un instant surpris par cette révélation surprenante.

"Votre... cible première ? Comment cela ? Ce groupe n'a rien à voir avec notre affaire ! Laissez-les !"

Un ricanement fut la seule réponse de son interlocuteur alors que les autres ombres commencèrent à se déployer afin de contourner l'obstacle que le Paladin représentait dans l'achèvement de leur mission mystérieuse. Qui cela pouvait-il être ? Mystère...

Mais le commanditaire ne semblait être nul autre que le Prince-Démon Tanetal lui-même, son adversaire d'hier et d'aujourd'hui, encore une fois...

Turielo avait entendu le paladin crier et le danger qui était présent, il sortit sa rapière et se rapprocha de Fanriël, qui était non loin de lui

-" Tiens bien ta dague dissimulée et viens ! "

Le jeune elfe laissa sa soeur adoptive courir devant lui, une action semi consciente, il ne voulait pas qu'elle soit une cible en le suivant comme sa feu vraie soeur. Il entreprit donc de la couvrir.
Ils allèrent rejoindre le groupe que l'ange était entrain de former et ce dernier avait prit l'initiative de protéger ceux qui en avaient besoins, Turielo lui en était reconnaissant. Il s'envola ensuite. En arrivant prestement Turielo s'adressa a Eraneir.

-" Décidément les affaires reprennent, gardons ceux qui ne peuvent se battre près de nous "

Il laissa un regard à Leila et lui dit brièvement

-" Fait attention à toi "

*Non, je ne peux, ce n'est pas mon rôle. De toutes façons, je serais impuissant contre eux, inutile, tout ce que je peux faire c'est enduire leurs armes de cet onguent contenant de l'eau sacré, mais qui sait quel effet cela aura... Tant pis, je n'ai rien de mieux à faire.*

Alors prudemment, il prit son courage à deux jambes, reculant petit à petit.
Le paladin avait certainement une épée bénie et n'avait besoin de son concours. L'ange des pouvoirs de nature bonne et peut-être une épée du même acabit que celle de l'armure. Restait donc l'elfe et les elfes noirs... Mais personne n'avait l'air de venir à sa rencontre. Quand on voyait l'état des deux jeunes, cela se comprenait. Sifflant entre ses dents pour rappeler son ami, le camp fut vite atteint.

« Notre ami en armure aura peut-être besoin d'aide, si vous le voulez, j'ai un onguent béni, mais je ne suis pas sûr de son efficacité, dit-il à l'assemblée. »

Ses dagues avaient maintenant réintégrées son manteau qui devait être ouvert sur les dimensions pour pouvoir en contenir autant... Il se remit à réfléchir : le paladin n'était pas leur cible principal, qui alors ? Devant la diversité du groupe, la question pouvait vraiment se poser. Ca irait tant que ce ne serait lui.

-Tu ferais passer une maussade histoire d'amour (si on peut appeler ça de l'amour) vieille de cinquante ans devant une fraiche histoire de cœur qui ne demande qu'à bien se terminer, esquiva Eraneir, ? Bla bla bla. Je me demande si je ne devrais pas parler à Turielo. Ça aiderait peut-être les retrouvailles, non?, poursuivit-il, l'air songeur, en se grattant la barbe qu'il n'avait pas (une habitude prise à Dragz').

Et tandis que l'elfine réagissait à cette assertion, il observa le camp en face de lui. Le calme tranquille qui se détachait des tâches quotidiennes (faire le feu, la popote...) le surprit étrangement mais agréablement. Il s'y fondit un court instant, puis commença à se retourner vers Leïla et lui redonner toute son attention. Et s'arrêta. Derrière lui, le paladin fantôme s'était mis à charger, demandant à Sylph de l'aider à combattre.
Les créatures de l'En-dessous!
Il prit l'épaule de Leïla et commença à la pousser fermement mais sans brusquerie en direction de la roulotte de Nymia.
"-Viens!"

Une fois au niveau de la roulotte, il commença à réfléchir. Enfin, d'abord il regretta que son moment de tranquillité ait été brisé, puis il se mit à réfléchir.
Nymia, comme ses chevaux, réagissaient avec peine. Elle ne pouvait clairement pas participer au combat, que ce soit d'une façon ou d'une autre. Pis, elle serait un véritable poids lourd. Ruminant la disposition de chacun, gardant un œil vers le paladin, il n'entendit pas Sylph lui parler, et compris la phrase de Toomagic avec un temps de retard.
-Oui! Très bonne idée, l'abbé! Leïla, sors ton arme, qu'il la bénisse. Je fais de même. J'espère que vous avez suffisamment d'onguent, mon père!
Dit-il, son ton humoristique gâché par son empressement.
Enfilant ses gants, il se mit alors à sortir ses 2,00 mètres de lames de leur bâton-fourreau

Bon, ces créatures n'ont pas l'air trop nombreuses, le paladin semble les connaître... La plupart des membres de l'équipée semblent bien mal en point ou encore endormis,... Il faut nous défendre... Contre ces créatures inconnues ? On dirait des êtres de l'En-Dessous, seul un chamane pourrait combattre ce type de créature... Ou un mort ! Et qui est mort ici ? Le paladin bien sûr ! Nous autres ne servons sans doute à rien...

Le semi-Ange regarda autour de lui. Ils étaient dans une forêt, la nuit,... Fuir n'était pas la chose la plus facile à faire dans de telle conditions. Se dissimuler, voilà ce qu'il faut faire. Slyph chercha dans ses souvenirs ce qui pourrait les aider dans une telle situation. Il y avait bien la bataille de Kyz-yel, contre les gobelins. Là une troupe barbare avait pu traverser une armée entière à l'abri du brouillard. Oui ! Du brouillard ! On n'y voit rien et même si leur vue était basée sur l'ouïe, cela la brouillerait... Il huma l'air. Humide, tant mieux, ça sera d'autant plus facile. Il se concentra.

Ag, pyr, egol amtil choral ! murmura-t-il.

Soudain, toute l'humidité de l'air prit de la consistance, s'épaissit, une véritable purée de pois se matérialisa dans la clairière. Il fit aussi plus froid et le feu de camp faiblit.

Espérons maintenant que ces horreurs ne voient pas dans le brouillard.

L’ombre ressentie par Leïla se profilait plus précisément dans le ciel. La petite elfe avait d’autres choses à penser pour ressentir ce malaise, son esprit accaparé par sa discussion avec Eraneir et récemment de façon beaucoup plus pesante par l’apparition envahissante des spectres encerclant le chevalier glacé. Un épais brouillard avait fait son apparition, empêchant les personnes se situant à l'extérieur du champ des spectres de distinguer leurs ennemis plus qu'autre chose. Une sorte de diversion ?

La silhouette en hauteur se détachait encore bien peu des nuages noirs qui planaient sur la scène comme un mauvais augure. Les ailes aux palmures argentées battaient tranquillement, les yeux aux reflets d’émeraude scrutaient le sol d’un air indifférent. Doucement, Liriae descendit en direction du camp. Les spectres ne semblaient pas l’intimider outre mesure, alors que les autres restaient à distance honorable, masquée par le nuage artificiel, elle se plaça au dessus d’eux. Son regard se posa sur l'endroit où elle devinait son compagnon en armure, plein de regrets.

- Mon cadeau ne fut pas vain, mais te voilà à présent au cœur d’une situation insoluble...

Avec une lenteur calculée, l’elfe tendit la main au dessus de lui. Pour la sauvegarde de ses compagnons, et en particulier de Turielo, qui s’était posé en protecteur pour les petites, un sacrifice serait nécessaire.

- Ta vie pour celle de mon fils.

L’incantation silencieuse provoqua l’effondrement du sol. Les spectres immatériels étaient sortis du néant, insaisissables, invincibles. La terre les appela pourtant, et ils tombèrent dans le gouffre accompagné du sujet de leur rancœur. Ce dernier emporterait avec lui ses regrets et son souvenir de Virwen, celle que lui rappelait tant l’elfe ailée. Liriae resterait dans l’ignorance à ce propos, mais cela importait peu...
Le gouffre se referma sur les pensées ambivalentes de l’ensorceleuse, ne laissant sur le sol blessé qu’une funeste balafre. Avec une triste lenteur, l’elfe noire se tourna vers ses compagnons, incertaine qu'ils voient son sourire, un simple salut.

Un bruit sourd, comme une mélopée venant des entrailles de la terre. La brume lui masquait la vue, et pourtant son flair, lui révélait, avec horreur, qu'une brèche de malheur s'était ouverte en la terre. En se retournant, les noires silhouettes les menaçant avaient disparus pourtant. Tout comme l'armure froide du nom d'Agaërnohn. Un vent de puissance avait soufflé, et toutes les nuisances s'étaient envolées. Incompréhensible. Que s'était-il passé ? Comme le brouillard commençait à se dissiper, une ombre sur le sol vint tout expliquer. Levant les yeux au ciel, il l'aperçut :
*Liriae...

Ce retour était une bonne nouvelle car, à présent, aucune force ne pourrait les arrêter. Mais c'était une source d'inquiétude car d'un mot de travers et tout était terminé.
*Quelle puissance tout de même ! Jamais je n'aurai imaginé voir un jour telle magie à l'œuvre. Mieux vaut se montrer sage et prévenant car le sacrifice de son ami à dû lui coûter. C'était un fier chevalier. Que présage un tel retour pour la suite de notre aventure ? Vers quels périls nous mènera-t-elle ? Pourrons-nous ne serait-ce que nous en sortir là où elle passe sans se retourner ? La différence de puissance semble énorme, que pouvons-nous donc pour un tel être, un tel mélange ? Quelle est donc son espèce ? Pour l'instant, laissons ces questionnements de côté, et allons plutôt l'annoncer...*

Et c'est ce qu'il fit.